https://www.traditionrolex.com/25 Les Conciliateurs ont désengorgé les tribunaux à 80,5%

Les Conciliateurs ont désengorgé les tribunaux à 80,5%

Par 2015-07-28 10:07:37

[caption id="attachment_1620" align="aligncenter" width="705"]Johnson Busingye, ministre de  la justice, considère les comités des conciliateurs comme un succès (Photo archives) Johnson Busingye, ministre de la justice, considère les comités des conciliateurs comme un succès (Photo archives)[/caption]


 

A l’issue de leur mandat, les Comités de Conciliateurs sortant se disent satisfaits de leurs prestations pour avoir contribué à rendre une justice de proximité et pacifique allégeant ainsi la tâche aux juridictions ordinaires à l’échelle de 80,5.

Etienne Mayira a été membre du comité des conciliateurs au niveau de la cellule de Nyamagana , district de Ruhango. Il fait savoir que les débuts de leur mission furent difficiles car la population n’avait pas la confiance en eux et voulait à tout prix se ruer vers les tribunaux.

”Quand on nous a élu, nos voisins pensaient qu’ils ne pouvaient pas nous exposer leurs problèmes surtout en matière matrimonial , mais quand les tribunaux leur demandaient d’abord l’acte de jugement du comité des conciliateurs, ils ont été obligés de passer d’abord par nous avant d’aller dans les tribunaux. Quand ils ont vu que les jugements rendus par nos comités étaient exécutoires et que les autorités de base supervisaient l’exécution en qualité de huissiers publics, la confiance en nous a été renforcée par la proximité.”

Dans un entretien avec le Secrétaire du Comité de Conciliateurs sortant de la Cellule Cyivugiza du Secteur Nyamirambo, Gaspard Kagigima, celui-ci ne cache pas sa satisfaction.

”Nous sommes satisfaits du travail réalisé durant ces cinq ans de notre mandat, car nous avons pu résoudre pas mal de conflits en permettant aux parties en conflit d’épargner l’énergie, le temps et les frais qu’ils allaient dépenser en allant aux tribunaux.”

Il pointe du doigt certaines gens qui ont tenté de corrompre ou d’influencer les membres du Comité en les invitant parfois à prendre un verre ensemble après les séances, mais il se félicite du fait que cela n’ait pas réussi à gâcher leur mission de médiation et de conciliation.

De même, il met en garde les parties en conflits qui s’absentent intentionnellement le jour et sur le lieu du procès, car cela décourage les conciliateurs dévoués à ce bénévolat.

Kagigima renchérit en expliquant le rôle qu’ils ont joué. ”Ceci est notre contribution à l’effort de construction nationale pour parvenir à un Etat de droit effectif, et cela n’a pas de prix”.

Néanmoins, bien que cela n’ait pas de prix, Kagigima considère que le Gouvernement devrait songer à une quelconque prime, minime soit-elle, pour que les conciliateurs puissent régler certains besoins relatifs à leur mission notamment le transport ou le repas dont ils ont besoin sur terrain.

Au même titre que ses collègues, Kagigima demande au Ministère de tutelle, le MINIJUST, de leur octroyer un Certificat de mérite comme couronnement de leurs efforts.

Succès pour le ministère de la justice

Dans son entretien avec la Presse, le Ministre de la Justice, Johnson Busingye s’est lui-même dit satisfait des résultats réalisés par les Comités des Conciliateurs car dit-il ”ils ont réduit les procès qui allaient dans les tribunaux”.

Selon lui, parmi les plaintes reçues par les Comités de Conciliateurs, 80,5% sont résolues à ce stade, tandis que seules 19,5% d’entre elles font appel dans les tribunaux.

Si l’on s’en tient aux pourcentages ci-dessus, il est aisé de dire que les Comités des Conciliateurs ont réduit de 80% les procès préalablement destinés aux tribunaux.

D’autre part, il a été remarqué que parmi les procès qui continuent en appel dans les tribunaux, 50% d’entre eux reçoivent le même verdict que celui prononcé à l’avance par les Comités de Conciliateurs.

Les résultats d’une recherche confirme l’importance des comités des conciliateurs

D’après une recherche menée par l’Office Rwandais de la Gouvernance, (RGB) en 2014, l’image qui en est sortie portant sur l’appréciation des services rendus en général à la population au niveau de l’administration de base (Citizen Report Card), il a été prouvé que la population est satisfaite à 67% des services que leur rendent les Comités des Conciliateurs contre 5.7% d’insatisfaits.

Les résultats d’une autre recherche menée par la même institution, RGB, en 2012 au sujet des prestations de Comités de Conciliateurs ont prouvé à suffisance que ces derniers sont d’une grande utilité pour la population.

D’après ce rapport de 2012, le temps gagné par la population, c’est-à-dire le temps qu’ils allaient dépenser pour aller aux tribunaux est à l’échelle de 86,7%.

Les frais relatifs au procès sont aussi réduits de 84,2% tandis que la réduction des conflits est estimée à 80,1%.

La même recherche a prouvé que la population est satisfaite des prestations des Comités de Conciliateurs à 77,2%, estimant en même temps la compétence des conciliateurs à 76%.

Au sujet du fonctionnement du secrétariat des Comités de Conciliateurs, la population a donné la côte égalant 81,5%, la confiance qu’ils ont en ces Conciliateurs à 75,9%, tandis que la qualité de leur travail est estimée à 75,4%.

Au regard de ces appréciations, le Ministre Busingye a exprimé sa satisfaction et, par voie de conséquence, a tenu à remercier les membres des Comités de Conciliateurs et tous ceux qui ont contribué à cette réussite, y compris les autorités administratives de base, notamment les Secrétaires de Cellules et Secteurs, les bailleurs des fonds ainsi que les ONGs qui épaulent le Ministère de la Justice lors des différentes formations accordées aux conciliateurs.

Pour le Ministre Busingye ”l’objectif est qu’en 2020 les jugements rendus par les Comités de conciliateurs s’élèvent à 95%”.

Eléments importants prévus dans la nouvelle Loi régissant les Comités de Conciliateurs

Alors que les élections de nouveaux Comités de Conciliateurs sont prévues dès la fin de cette semaine, bientôt sera promulguée une nouvelle loi organique qui modifie et complète la Loi organique No 02/2010/OL du 09/06/2010 portant organisation, ressort, compétence et fonctionnement du Comité de Conciliateurs.
Dans cette nouvelle loi, bien d’éléments nouveaux sont incorporés à commencer par le nombre des Conciliateurs qui passe de 12 à 7.
D’autre part, le pouvoir des Conciliateurs a été étendu sur base de la nature du procès.
Ainsi, pour les procès qui relèvent des affaires civiles, la valeur des éléments qui font l’objet du conflit passera de 3.000.000 Frw à 5000.000 Frw tandis que pour les affaires pénales, la valeur de l’objet du crime passera aussi de 3000.000Frw à 5000.000Frw.

Par ailleurs, le pouvoir des Conciliateurs est désormais étendu aux crimes tels que le chantage, l’escroquerie, le tapage nocturne et la mauvaise foi dans les transactions.

Dans les affaires civiles, les Conciliateurs pourront trancher les affaires relatives aux titres fonciers et aux animaux domestiques, ainsi que les procès relatifs à la succession sans tenir compte de la valeur de l’objet du conflit.

Les dispositions des Juridictions Gacaca concernant les procès relatifs aux biens endommagés ou pillés au cours du Génocide perpétré contre les tutsi en 1994 seront aussi parmi les nouvelles compétences des Conciliateurs.

Au sujet du ressort, le pouvoir a également été étendu car, avant la modification, le Comité de Conciliateurs ne recevait de plainte que lorsque les deux parties étaient du même ressort, c’est-à-dire de la même cellule administrative, mais avec la nouvelle loi, le pouvoir est attribué au Comité de Conciliateurs du ressort du prévenu, au Comité du ressort du plaignant sur consentement des deux parties, au Comité du ressort de l’objet du procès et au Comité du ressort où le crime a été commis.
D’autre part, le Comité de Conciliateurs aura le pouvoir d’examiner la plainte dans le cas où l’objet du procès se retrouve dans plusieurs ressorts.

Dans la nouvelle loi, des stratégies ont été mises en place pour permettre la mise en application des décisions prises par les Comités de Conciliateurs de la part des parties concernées.
En cas de retard dans l’application, il a été prévu une amende de 500Frw par jour. En cas de récidive avant que le crime ne tombe en désuétude selon les dispositions légales, la nouvelle plainte sera adressée au tribunal compétent.

Le Ministre de la Justice, Johnson Busingye demande à la population d’appuyer davantage le système judiciaire en contribuant à la résolution pacifique des conflits.

C’est dans ce sens qu’il exhorte tout un chacun, particulièrement les intellectuels, à se porter candidat aux élections en vue.


 

[caption id="attachment_1621" align="aligncenter" width="715"]Les comités des conciliateurs sont plus proches de la population que les tribunaux (Photo James R) Les comités des conciliateurs sont plus proches de la population que les tribunaux (Photo James R)[/caption]


 

Comité des conciliateurs : une réussite des juridictions populaires au Rwanda

Les Comités des conciliateurs ont été une solution pour différents problèmes comme les conflits familiaux, les dépenses inutiles, les retards dans les jugements du fait du nombre de procès, du manque de juges et des greffiers et même des salles d’audiences dans les tribunaux.

Avant les élections de juillet 2015, ceux qui ont bénéficié d’un procès équitable et moins onéreux via les comités des conciliateurs trouvent que l’institution a bien rempli sa mission, les membres des comités des conciliateurs qui ont longtemps travaillé comme bénévoles quand eux estiment que leur responsabilité est un risque qui mérite une protection légale et sociale.

Les témoignages des clients qui ont bénéficié d’un procès devant le comité des conciliateurs quand à eux louent la probité, l’intégrité des hommes et femmes incorruptibles.

”J’avais un problème avec mon beau frère à propos d’un lopin de terre et j’avais porté mon procès devant le tribunal de Canton local, l’affaire venait de faire plus de 8 ans. Avec les comités des conciliateurs, il fallait établir la valeur économique de mon champ, et des pertes que l’on m’a causées, quand j’ai vu que cela ne dépassait pas 3 millions de francs, on a référé notre litige devant les conciliateurs. Mon beau frère a tenté de corrompre les membres du comité des conciliateurs mais n’y est pas parvenu car ils étaient 12, or il est très difficile de convaincre une aussi grande équipe d’adhérer à un plan pernicieux. La tentative de corruption a été une preuve à conviction qui a motivé la décision du jury. Je pense que les conciliateurs sont capables de trouver des solutions à des problèmes comme le mien car, ils sont proches, peuvent se rendre sur le terrain, et peuvent mener une enquête auprès de leurs voisins,” a laissé entendre un certain Samuel Nkurikiyinka.

Une tendance à la corruption

En milieu rural, les conciliateurs sont intègres et la population ne les confond pas avec les autorités de base.

En ville, les conciliateurs sont souvent accusés de monnayer leur service. Un habitant de Kicukiro dans la ville de Kigali qui, un jour, a adressé une requête devant le comité des conciliateurs de sa cellule, affirme qu’il s’est heurté à une demande de payer de ”l’eau à boire” pour l’équipe.

”Je pensais que c’était de l’eau minérale, mais ils m’ont demandé la somme pour leur journée, heureusement que devant mon refus ils n’ont pas insisté. Je pense qu’il faudra voir comment leur rassemblement soit ouvert aux autres personnes car leur clandestinité peut être une occasion de détourner la mission de l’institution.” A-t-il affirmé.

Les anciens conciliateurs qui ont eu à trancher sur un contentieux pénal font état de quelques griefs portés contre eux après le procès.

”Il ya des cas rares où les personnes en conflit doutent de la justice rendue parce qu’elles sont nos voisins, je pense qu’il faut une grande campagne de sensibilisation pour que la population se mette en tête que les conciliateurs sont pour une justice qui vise le vivre ensemble, ils doivent comprendre la mission d’aider la population à ne pas trainer dans les tribunaux, à éviter les dépenses,” affirme Murasira du Secteur Niboye , district de Kicukiro dans la ville de Kigali.

Le ministère de la justice a un département chargé de l’évaluation et du suivi des comités des conciliateurs. Les rapports des districts montrent que ces comités ont atteint des résultats probants. La nouvelle loi qui étend le pouvoir des comités des conciliateurs à des contentieux portants sur des litiges ayant un valeur économique d’au moins 5 millions de francs Rwanda est un signe que les comités des conciliateurs- Abunzi , est un organe juridique non classique incontournable dans la gestion des conflits au niveau de la base et dont la contribution dans la cohésion sociale reste un fait remarquable.

Pascal Niyonsaba & Jean Louis Kagahe


 

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