[caption id="attachment_2275" align="aligncenter" width="738"] Le milieu rural rwandais est doté de l’électricité (Photo Archives)[/caption]

 

Depuis que le raccordement au courant électrique n’est plus l’apanage des villes au Rwanda, le milieu rural a changé de physionomie. De nouvelles occupations naissent et les conditions de vie de la population sont améliorées. Certains jeunes préfèrent aujourd’hui la campagne plutôt que la ville….

L’accès à l’électricité inverse l’exode rural

Le milieu rural rwandais intéresse de plus en plus les citadins. Ils sont nombreux à quitter leurs villes pour habiter les villages désormais électrifiés. Ceux-ci se transforment en nouveaux centres commerciaux qui font appel aux hommes d’affaires pour leurs opportunités économiques. L’électricité inverse donc la logique de l’exode rural…

Depuis les indépendances des pays africains, les mouvements migratoires de leurs populations vers les villes se sont accrus en terme de l’exode rural. Les motivations sont purement économiques : la recherche du travail et des services divers en parallèle avec des infrastructures comme des hôpitaux, des écoles, des routes aménagées et pourquoi pas l’électricité qui reste et demeure à présent au centre de toutes les activités humaines.

Le Rwanda n’a pas échappé à cette règle d’exode rural, et pour preuve, les villes rwandaises sont plus habitées que les villages. Sur les 10,5 millions des Rwandais, seule la ville de Kigali abrite deux millions, soit 19% de toute la population du pays. Ce phénomène montre clairement qu’une grande concentration des populations se trouvent dans les villes pour les causes citées ci-haut.

Avec l’apport de l’électricité dans les milieux ruraux (2006), des villages ont été éclairés, donnant par la suite naissance aux centres commerciaux très mouvementés. Les citadins dont les moyens financiers sont limités, ont vite pris le goût d’habiter les villages pour améliorer leurs conditions de vie. Ils y ont amené plusieurs activités lucratives et construit des maisons en dure.

Les agglomérations proches de Kigali ont été transformées en villes comme le souligne M. Louis Mbonigaba, kigalois qui a quitté le quartier populaire de Gitega (Kigali) pour habiter à Ruyenzi, sud, à quelques trois kilomètres de Kigali.

"Ruyenzi est déjà une ville. N’eut été la rivière Nyabarongo qui le sépare du centre commercial de Nyabugogo (Kigali), je présume que ce centre de Ruyenzi serait annexé à la capitale", témoigne Mbonigaba, l’exode urbain qui prend de l’ampleur.

Non loin de Ruyenzi, dans le secteur administratif de Rugalika, Sud, des villages sont éclairés la nuit et pendant le jour, les activités commerciales et autres activités facilitées par l’électricité sont très nombreuses.

"Je ne fais plus de descente à Nyabugogo à la quête des matériaux de construction. Des quincailleries sont parsemées ici et là, les soudeurs fabriquent des portes et fenêtres, les mécaniciens réparent des véhicules, en gros l’électricité a transformé notre village en un centre commercial qui ne dépend pas absolument des villes", remarque Ahmed Turinabo de la localité de Musambira qui a démenagé depuis 2010 de Kimironko (Kigali) à Musambira.

La scène est identique dans d’autres provinces du pays. En commençant par des agglomérations proches de Kigali, comme Rwamagana, Nyamata, Mageragera, etc., l’électricité a permis à plusieurs Rwandais de convoiter le milieu rural.

"Dans le temps passé, plusieurs jeunes quittaient le village à la recherche du travail dans les grandes villes (exode rural). Mais à présent, la scène a changé de sens, les citadins vont dans les villages attirés par l’électricité qui favorise la création des opportunités de survie. C’est la raison d’être des villas dans les entités administratives alors hier marginalisées", estime Canisius Nkeshabagabo de la localité de Nyamata. Celui-ci atteste qu’il y a à peine 10 ans, très peu de ménages avaient accès à l’électricité, maintenant, c’est de l’histoire…

Les efforts du gouvernement et défis à l’accès à l’électricité

A travers le septennat (2010-2017) du Chef de l’Etat Paul Kagame, la Primature rwandaise a parié de raccorder en électricité plus de 50% de la population et à l’horizon de 2020, ce taux aura atteint 70%. La Primature a assuré le suivi pour l’électrification de tout le pays dans le cadre d’assurer un développement équilibré dans tout le pays.

Le Premier Ministre Anastase Murekezi en parle souvent dans le cadre de la bonne gouvernance. "L’énergie électrique est un des indicateurs du développement. Lorsqu’elle est profitable à tous, les milieux ruraux sont rapidement développés", indique un document de la Primature rwandaise.
Des centres de négoce éclairés et légèrement industrialisés sont nés ici et là dans le pays grâce au raccordement électrique du milieu rural.

"Pendant la nuit, tout le Rwanda est éclairé, on croirait que toutes les villes sont collées les unes aux autres. De nouveaux centres de négoce sont nombreux et les services sont appréciés", montre Gérard Muhawenayo, ancien vétérinaire, étonné par des photocopieuses et salons de coiffure dans le centre retiré de Gahunga (Muhanga) au pied du volcan Muhabura, Nord.

Cependant, des défis sont à souligner. La grande partie des ménages rwandais dans les milieux ruraux sont pauvres bien qu’ils aient accès à l’électricité. Mme Jacqueline Murekeyisoni originaire du secteur administratif de Byumba, Nord, a évoqué un fait qui montre la vulnérabilité de certains ménages qui ont de l’électricité, mais hélas, qui ne peuvent pas assurer la continuité du paiement mensuel de l’électricité.

"Qu’est-ce que j’ai remarqué ? Je vois des familles qui viennent charger leurs téléphones portables chez mes parents chaque matin et soir. Et quand je leur demande pourquoi ils ne font pas cela chez eux, ils répondent qu’ils n’ont pas du courant…", a-t-elle observé.

Le prix à l’électricité a été révisé et majoré au mois de septembre dernier. Un document issu du Ministère des Infrastructures met en relief des prix sur l’électricité suivant deux domaines : industriel et ménager.

En effet, les industriels doivent payer 126 FRW/KW alors que les ménages doivent aller jusqu’à 182 FRW/KW. Cette différence est significative en termes d’encouragement des unités de production au Rwanda et des investisseurs. Pour un citoyen dont les revenus mensuels sont maigres, c’est difficile de se procurer de l’électricité et d’en jouir quotidiennement en face de plusieurs besoins.

Safari Byuma