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Burundi : la répression excessive des élèves inquiète

Par 2016-06-27 10:06:39

 

[caption id="attachment_3239" align="aligncenter" width="1058"]Le gribouillage de la photo de Pierre Nkurunziza prend des proportions inquiétantes (Photo archives) Le gribouillage de la photo de Pierre Nkurunziza prend des proportions inquiétantes (Photo archives)[/caption]


 
Dans plusieurs provinces du pays, la question du gribouillage de la photo du président Pierre Nkurunziza semble se poser dans presque toutes les écoles. Des sanctions sévères ont été prises à l’égard des mineurs et paraissent prendre des dimensions politiques, ethniques et régionales.

Tout a commencé avec le lycée municipal de Ruziba ( à quelques 15 kilomètres du centre ville de Bujumbura) où le 3 juin, plus de 300 élèves ont été chassés pour avoir abimé la photo du président Nkurunziza se trouvant dans les livres de sciences humaines de 8e de l’enseignement fondamental.

Les responsables scolaires, en collaboration avec le service national des renseignements (SNR) ont dit qu’ils ont pris la décision de renvoyer tous les élèves des classes de 8e parce qu’ils ont refusé de dénoncer les auteurs de ce "sacrilege".

Ces élèves ne seront autorisés quelques jours après à reprendre le chemin de l’école qu’après une réunion avec leurs parents qui ont accepté de payer chacun une somme de 1500 fbu pour remplacer les livres endommagés.

De tels cas des photos du président Nkurunziza gribouillées ont été également découverts dans une dizaine d’écoles de Bujumbura mais tout a été réglé "discrètement", comme l’a fait savoir un cadre du ministère de l’éducation.

Des cas de gribouillage de la photo du président ont ensuite été signalés le 5 juin au lycée communal de Muramvya. Il a été rapporté que les responsables de l’école avaient déjà sanctionné les coupables mais c’est quand les services de renseignement s’en sont mêlés que les choses se sont compliquées.

Emprisonnement des élèves y compris des mineurs

11 élèves seront arrêtés et emprisonnés parmi lesquels des mineurs. Mais suite aux cris au scandale lancés par différentes associations de défense des droits de l’homme et des enfants, trois mineurs de moins de 14 ans seront relâchés. 8 élèves dont 5 filles et 3 garçons resteront et restent encore écroués dans les cachots de la prison de Muramvya.

Suite à cet emprisonnement que d’aucuns ont jugé injuste et abusif, tous les élèves du lycée communal de Muramvya et des autres établissements environnant sont descendus dans la rue pour exiger la libération de leurs camarades.

La police de Muramvya ouvrira ensuite le feu contre ces élèves pour les disperser. Bilan  : 3 personnes grièvement blessées dont 2 lycéens et un motard qui succombera par la suite à ses blessures. Des informations provenant de Muramvya indiquent que d’autres élèves continuent d’être interrogés et arrêtés.

D’autres cas de gribouillage de la photo du président Pierre ont été rapportés dans la province de Ruyigi, dans l’extrême Est du pays. C’est précisément au collège communal de Gihinga en commune de Gisuru où environ 230 élèves des classes de 8e et 9e années fondamentales ont été renvoyés le 13 juin parce qu’ils n’ont pas voulu pointer du doigt les auteurs du gribouillage sur la photo du président Nkurunziza.

Les responsables administratifs et scolaires ont indiqué que pendant toute une semaine les élèves ont catégoriquement refusé de dénoncer leurs camarades qui ont abîmé la photo du président. " Nous avons distribué des feuilles de papier à tous les élèves de 8e et 9e années pour qu’ils y inscrivent discrètement les noms des coupables mais ils ont tous remis des feuilles vierges".

L’administrateur de la commune Gisuru, Aloys Ngenzirabona , a juré qu’ils ne reviendront à l’école qu’après avoir dénoncé les responsables de "cet acte ignoble".

Signalons que des cas pareils de gribouillage de la photo du président Nkurunziza ont été rapportés presque dans toutes les écoles des autres provinces du pays notamment à Bubanza, Cibitoke, Gitega, Karuzi, Rutana, Makamba et Cankuzo, ainsi que en mairie de Bujumbura.

Seule la photo de Nkurunziza gribouillée

Dans les livres de sciences humaines de 8e année, la photo du président est au milieu des photos des anciens rois du Burundi Mwezi Gisabo et Mwambutsa Bangiricenge.

Mais seule celle de Nkurunziza a été gribouillée par les élèves des différents établissements. La photo est déformée, ils y ont écrits des propos comme " wa ntumva we" (le sourd), "tuveko" (dégage), "non au 3e mandat", "nkurumbi" (mauvaise nouvelle). Des croix rouges ont été marquées sur le front de la photo du président tandis que les yeux ont été crevés peut-être à l’aide d’un compas. Mais sur les photos des deux rois rien n’a été marqué.

Dans les livres de la 9e année, la photo du président est avec celles des présidents comme Ndadaye, Kikwete et Obama. Mais seule celle de Nkurunziza a été abimée.

Au collège de Gihinga (Ruyigi), les photos de ces autres présidents portent la mention "ok". Sur cette affaire de gribouillage de la photo du président Nkurunziza, les parents et certains pédagogues pensent que la question a été traitée "maladroitement" par les autorités scolaires et administratives.

Les parents et certains enseignants affirment que la question aurait été résolue à l’interne. Ils estiment, surtout à Muramvya, que les élèves arrêtés et incarcérés l’ont été injustement surtout qu’il est difficile de trouver les vrais auteurs.

Au lycée communal de Muramvya, expliquent-ils, pour 180 élèves de 8e année, l’école ne dispose que 24 livres qui sont utilisés dans trois classes. Seuls dans 2 livres la photo du président est restée intacte.

D’autres personnes se demandent pourquoi ce qui devait être un fait divers a pris une dimension criminelle. Pour eux, les établissements auraient pris les choses en main et éviter que l’affaire soit pénale et nationale d’autant plus qu’il s’agit de la jeunesse "Burundi d’aujourd’hui et de demain".

Des dimensions politiques et ethniques évoquées

Cependant, des analystes commencent à penser que la question a pris des dimensions politiques, ethniques et régionales dans son traitement. "Comment expliquer que des sanctions très sévères allant jusqu’à l’emprisonnement et au renvoi définitif aient été prises aux élèves de Muramvya, de Ngagara et Mugamba, majoritairement tutsi et anti-troisième mandat, alors que les autres de Ruziba et Cibitoke sont tous retournés à l’école et ont passé le test de 9e  ?", s’est interrogé I.B.

Pour sa part, la Fédération nationale des associations engagées dans le domaine de l’enfance (FENADEB) parle de montée de tensions en milieu scolaire entre groupes de jeunes affiliés à différents partis politiques. "Les uns et les autres rivalisent de messages agressifs, d’actions de diabolisation, de fanatisme politique et d’agressions physiques", a révélé le président d la FENADEB Jacques Nshimirimana avant d’ajouter que si des mesures de prévention ne sont pas prises à temps, il ya risque que les écoles versent dans la violence.

Tesire Mudahemuka


 

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