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Burundi : Nkurunziza prépare sa perte

Par 2016-08-15 08:03:21

La décision du Burundi de s'isoler risque de se retourner contre le Président Nkurunziza (Photo archives)

 

La mesure dernièrement prise par le gouvernement du Burundi de fermer les transports en commun vers le Rwanda et d’interdire le commerce des produits vivriers avec les pays limitrophes risque d’accentuer davantage l’isolement du pays et d’aggraver les mauvaises conditions de vie dans lesquelles se trouve déjà la majorité de la population burundaise. Celle-ci pourrait ne pas supporter longtemps ce calvaire.

Suite à la fermeture des transports en commun vers le Rwanda depuis le 6 août dernier, des conséquences négatives commencent à se manifester. Les commerçants qui travaillent à la frontière parmi lesquels des membres du parti au pouvoir, CNDD-FDD, voient disparaître leur principale source de revenus.

”Nous ne voyons pas comment nous allons vivre et faire vivre nos familles avec cette diminution sensible du trafic à la frontière avec le Rwanda”, a indiqué un propriétaire d’un bistrot sous couvert d’anonymat, situé tout près de la frontière burundo-rwandaise de la Kanyaru Haut.

Des commerçants, majoritairement des femmes, qui se rendaient régulièrement en Ouganda en passant par le Rwanda, se lamentent que leur travail ne sera pas du tout facile.

Comment pourrons-nous voyager avec des bagages de marchandises en faisant plusieurs escales ? Interdire les agences Volcano, Yahoo et autres de franchir la frontière burundo-rwandaise équivaut tout simplement à nous lier les mains”, a indiqué avec angoisse Mme E. U.

Des répercussions sur les liens sociaux

Par ailleurs, cette décision risque de soulever des vagues à l’intérieur même du pays en raison de ses probables répercussions sur les liens sociaux entre les populations de part et d’autre de la frontière.

En effet, il n’est plus aisé pour de nombreuses familles de rendre visite à leurs proches qui se trouvent au Rwanda, surtout lorsqu’on sait que des mariages mixtes entre Burundais et Rwandais se comptent par millions.

”Nous projetions aller voir notre fille qui vient de mettre au monde un troisième enfant à Kigali car elle est mariée à un Rwandais. Mais comment lui rendre visite au moment où les bus des agences de voyage Volcano et autres ne sont pas autorisés à entrer au Rwanda ? Comment aussi y aller sans pouvoir lui apporter même un quart de kilos de Ndagala (petit poisson) surtout que présentement les taux de change de la monnaie burundaise contre les devises y compris la monnaie rwandaise atteignent des montants record jamais vus au Burundi ”, s’est plaint une famille burundaise résidant à Bujumbura.

Ceci est d’autant plus vrai que, même si des véhicules des particuliers sont autorisés à traverser la frontière et se rendre au Rwanda, ils ne peuvent cependant pas transporter les produits vivriers, quelle que soit la quantité, car le Burundi a aussi interdit l’exportation des denrées alimentaires vers les pays limitrophes.

Cette mesure a déjà eu des répercussions négatives sur les populations frontalières du Rwanda et de la Tanzanie qui ne cessent de se lamenter, à travers des médias comme radios Isanganiro, Voix d’Amérique, Inzamba et RPA, qu’avec cette interdiction d’échanges commerciaux, elles vont mourir de faim, qu’elles n’auront plus les moyens d’envoyer leurs enfants à l’école.

”Nous demandons avec insistance au gouvernement burundais de laisser continuer les échanges commerciaux avec le Rwanda parce que nous n’avons plus le marché d’écoulement suffisant et rentable de nos tomates, oignons, aubergines et ananas. Ces produits sont en train de pourrir dans les champs par manque de preneurs alors que ce sont des crédits contractés dans les banques que nous avons utilisés dans leur culture et que nous devons rembourser”, se sont plaints avec tristesse des cultivateurs de la province de Cibitoke, frontalière avec la localité de Bugarama, au Rwanda.

Mesures unilatérales

Concernant les raisons avancées qui ont poussé le gouvernement à prendre ces mesures que d’aucuns qualifient d’unilatérales, le porte- parole de la police Pierre Nkurikiye a indiqué que c’est pour des raisons de sécurité du pays et de sa population.

Pour la fermeture de la frontière aux transports en commun, le gouvernement croit pouvoir protéger les habitants du Burundi qui n’ont cessé d’affluer au Rwanda depuis le déclenchement de la crise née du 3e mandat de Pierre Nkurunziza. Il pense que ce faisant, les mouvements rebelles n’auront plus la possibilité d’augmenter leurs effectifs.

D’autres motifs évoqués par le gouvernement de Bujumbura sont notamment que le transport des armes et de nombreux ”criminels” qui entrent au Burundi serait assuré par ces bus de transport en commun .

Bujumbura avance aussi que c’est par le biais des bus de transport en commun Burundi -Rwanda et vice-versa que se fait le ravitaillement en vivres des mouvements rebelles.

Concernant la mesure d’interdiction de l’exportation des denrées alimentaires vers les pays voisins, les autorités de Bujumbura veulent faire croire que c’est pour prévenir à une probable pénurie de nourriture causée par la sécheresse.
Mais selon Faustin Ndikumana, président d’une ONG locale, PARCEM, qui milite pour la bonne gouvernance économique, la mesure est insuffisante car la production agricole connaît déjà un déficit de plus de 30%.

Pour cette ONG, au lieu d’interdire l’exportation des produits alimentaires tout simplement, il faut plutôt stimuler les échanges pour que l’on puisse avoir la chance de faire entrer des produits alimentaires supplémentaires en vue de combler le déficit.

L’ONG propose aussi au gouvernement de mettre beaucoup de moyens dans le secteur agricole et d’élevage dans la perspective d’augmenter rapidement la production alimentaire.

Nkurunziza prépare sa propre perte

Par ailleurs, d’après des observateurs de la situation politique et sécuritaire du Burundi, la rupture des relations économiques et sociales avec ses voisins, loin de constituer une recette miracle aux problèmes qui minent le pays, elle accentuera plutôt davantage son isolement et aggravera ainsi les conditions de vie, déjà pas bonnes, des populations.

D’aucuns pensent qu’en empêchant ses compatriotes de fuir en masse l’enfer au quotidien et en limitant les échanges économiques entre son pays déjà financièrement en ruine, et les autres pays de la sous-région, Pierre Nkurunziza est en train de préparer sans le savoir les conditions de sa propre perte car, laissent envisager des observateurs, un peuple burundais affamé et acculé n’aura nullement besoin d’un quelconque soutien de l’extérieur pour se débarrasser de lui.

Tesire Mudahemuka

 

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