https://www.traditionrolex.com/25 Affaire Munyeshyaka : le non-lieu discrédite la justice française

Affaire Munyeshyaka : le non-lieu discrédite la justice française

Par 2015-10-12 12:14:30

[caption id="attachment_1948" align="aligncenter" width="723"]Le secrétaire exécutif de la CNLG, Jean Damascène Bizimana (Photo archives) Le secrétaire exécutif de la CNLG, Jean Damascène Bizimana (Photo archives)[/caption]


 

Après le réquisitoire du Procureur de Paris dont le contenu stipulait à la mi-août 2015 un non-lieu dans l’Affaire de l’Abbé Winceslas Munyeshyaka accusé de Génocide, la justice française a, en début octobre 2015, fait montre de soutenir l’impunité en refusant de déférer Munyeshyaka devant la Cour d’Assises de Paris.

La Commission Nationale de Lutte contre le Génocide, CNLG, et IBUKA, l’Organisation Non Gouvernementale qui œuvre pour la mémoire du génocide contre les Tutsi du Rwanda, la justice envers les responsables de crimes génocidaires et le soutien aux rescapés des massacres perpétrés en 1994, sont aujourd’hui consternées suite à la décision de Paris qui, aux yeux du monde piétine la justice qui doit être rendue aux victimes du Génocide contre les Tutsi.

Dans un communiqué signé par le Secrétaire Exécutif de la CNLG, cette institution dénonce la décision rendue par la justice française, estimant que cela dénote le soutien que cette justice apporte aux personnes qui ont trempé dans le Génocide perpétré contre les Tutsi en 1994.

Comme on peut le lire sur la page du site https://www.fidh.org/fr,la Ligue des Droits de l‘Homme (LDH) et la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH) déclarent, ” nous allons faire appel de ce non lieu car les éléments présents dans le dossier sont, selon nous, amplement suffisants pour renvoyer Wenceslas Munyeshyaka devant une Cour d’assises” a déclaré Emmanuel Daoud, avocat de la FIDH.

De son côté, le Secrétaire Exécutif de l’Organisation IBUKA, Naphtar Ahishakiye souligne que quand bien même cette justice banalise les actes d’accusations portés contre ce prêtre rwandais accuse de génocide, cela ne pourra annuler la décision rendue par la justice rwandaise à son encontre et qui le condamne à une prison à perpétuité.

Les deux Secrétaires Exécutifs ont déclaré ” imaginez que le Parquet de Paris ait requis un non-lieu au procès Munyeshyaka le 19 août 2015, le tribunal vient à son tour de décider de ce même non-lieu”.
Une décision qui illustre l’image de la justice française

Selon toujours les auteurs de ce communiqué , bien que la justice française soit dite indépendante, il est néanmoins clair qu’elle couvre certains politiciens et militaires qui ont joué un rôle dans le Génocide perpétré contre les Tutsi emportant avec lui plus d’un million de vies humaines, non seulement en 1994, mais aussi entre 1990 et 1993, lorsque la France apportait son aide au régime génocidaire d’alors, cette aide s’étant traduite dans les domaines politique, militaire et diplomatique.

Une décision qui présage l’impunité des présumés génocidaires restant

Pour la CNLG, la décision de la justice française de ne pas déférer Munyeshyaka devant la Cours d’Assises couvre un scénario entache de négationnisme et fait entrevoir des procédures juridiques qui pourraient aboutir à l’impunité d’autres génocidaires qui se trouvent encore sur le sol français, dont bon nombre ont déjà acquis la nationalité française, une raison de plus de compliquer leur extradition vers le Rwanda.

La Commission de Lutte contre le Génocide fait savoir qu’il est en plus inconcevable que la France s’oppose à l’extradition vers le Rwanda des présumés génocidaires sous prétexte que ce crime ne figurait pas dans le Code pénal rwandais en 1994, année-même où s’est exécuté le génocide.

A ce propos, la CNLG considère que la France fait semblant de ne pas comprendre que les régimes de l’époque, régis aussi bien Grégoire Kayibanda sous la Première République ou Juvénal Habyarimana sous la deuxième République, ne pouvaient punir le crime de génocide alors qu’ils en étaient les concepteurs et les exécutants.

Une décision en contradiction avec la législation française

Selon la Commission, les justifications de la justice française n’ont pas de fondement étant donné que la Loi française No 96-432 du 22 mai 1996 relative à la révision des textes légaux français s’appuie sur la Résolution 955 du Conseil de Sécurité de l’ONU mettant en place un tribunal international chargé de juger les personnes ayant commis des actes de génocide et autres crimes contre l’humanité en 1994 sur le sol rwandais, voir sur d’autres rwandais qui vivaient dans les pays limitrophes.

Cette Loi 96-432, selon la CNLG, a introduit dans le Code pénal français tous les crimes poursuivis par leTribunal Pénal International pour le Rwanda, TPIR.

Selon le Collectif des Parties civiles-Rwanda, l’ordonnance de non-lieu rendue par le juge en charge du dossier de l’abbé Wenceslas Munyashyaka relève d’une décision ” tout simplement inacceptable, du point de vue des victimes et de leurs avocats”.

La FIDH et la LDH expriment leur profonde déception

”Il s’agit de la plus ancienne affaire concernant le génocide contre les Tutsi au Rwanda devant la justice française… 20 ans de procédure pour aboutir à un non lieu, c’est incompréhensible pour les victimes et nos organisations parties civiles qui attendaient la tenue d’un procès depuis 1995”, a déclaré Patrick Baudouin, avocat et Président d’honneur de la FIDH.

De nombreux témoignages le mettaient en cause pour avoir, alors qu’il exerçait dans l’Eglise de la Sainte Famille, à Kigali, participé à la perpétration du génocide, notamment en livrant des réfugiés tutsi aux miliciens et en affichant une collusion manifeste avec les autorités génocidaires.

Une information judiciaire avait été ouverte peu après le dépôt de plainte de victimes rwandaises réfugiées en France, en juillet 1995, informées de la présence de l’abbé Wenceslas Munyeshyaka à proximité de Privas. Wenceslas Munyeshyaka avait été mis en examen pour génocide, crimes contre l’humanité et actes de torture et de barbarie.

Le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), qui avait émis un acte d’accusation à son encontre en 2005, avait finalement décidé de renvoyer l’affaire à la justice française, conforté par l’engagement du ministre de la Justice de l’époque.

Depuis 1995, l’instruction a connu de nombreux temps morts, à tel point que la France a été condamnée en juin 2004 par la Cour européenne des droits de l’Homme pour violation du délai raisonnable. La procédure a finalement repris à la faveur du transfert du dossier au pôle crimes contre l’humanité, crimes et délits de guerre mis en place en janvier 2012 au sein du TGI de Paris.

Jean Louis Kagahe


 

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