https://www.traditionrolex.com/25 Génocidaires recherchés : timides arrestations et lents procès

Génocidaires recherchés : timides arrestations et lents procès

Par 2016-08-01 12:03:04

 

 

[caption id="attachment_3460" align="aligncenter" width="682"]Alain et Dafroza Gauthier ne désarment pas dans leur traque des génocidaires rwandais (Photo-net) Alain et Dafroza Gauthier ne désarment pas dans leur traque des génocidaires rwandais (Photo-net)[/caption]


 

L’arrestation et le jugement des présumés auteu\s du génocide perpétré contre les Tutsi encore recherchés à travers le monde finiront peut-être un jour par rencontrer la satisfaction des victimes qui attendent toujours que justice soit rendue, mais la réalité est que leur traque, leur arrestation et leur jugement évoluent à pas de tortue.

Tel est le souci du peuple rwandais face à un nombre important des présumés génocidaires qui circulent encore librement de par le monde, et surtout sur le continent européen où ils bénéficient parfois d’une protection d’anciens ténors occidentaux de la politique européenne en Afrique.

Après l’arrestation et la condamnation à perpétuité de l’ex-Bourgmestre de Muvumba, Onesphore Rwabukombe reconnu, en décembre 2015 par la haute Cour de Francfort, coupable de génocide et des crimes contre l’humanité durant le génocide perpétré contre les Tutsi en 1994, c’est au tour de Enoch Ruhigira, ex-directeur de cabinet du Président Habyarimana d’y être arrêté.

Alors que les victimes du génocide ont toujours réclamé que les quelques génocidaires arrêtés à l’étranger soient extradés vers le Rwanda où ils ont commis leurs crimes et, à défaut, qu’ils viennent y purger leur peine aussitôt condamnés par la justice étrangère, ce qui est remarquable est que ce processus a été exécuté timidement par quelques gouvernements.

Aujourd’hui d’aucuns se posent la question si Enoch Ruhigira pourra faire exception après son compatriote Rwabukombe ou Octavien Ngenzi et Tito Barahira, eux-aussi ex-Bourgmestres de Kabarondo condamnés le 6 juillet dernier à la peine de perpétuité par la Cour d’Assises de Paris pour génocide et crime contre l’humanité.

Pour ce qui est du procès de Pascal Simbikangwa aujourd’hui en appel et qui a été à son tour poursuivi en France, l’ex-capitaine de la garde présidentielle de Habyarimana ,   a été condamné le 14 mars 2014, 20 ans après l’innommable, à vingt-cinq ans de réclusion , "pour son rôle dans le génocide au terme d’un procès historique, le premier en France lié au drame rwandais", écrivait le Monde.

"Paraplégique depuis 1986 et cloué dans un fauteuil roulant à 54 ans, il avait été reconnu coupable de génocide en qualité d’auteur et de complicité de crimes contre l’humanité par la cour d’assises de Paris, à l’issue d’un procès fleuve de six semaines et d’un délibéré de douze heures", avait poursuivi le journal Le Monde.

En décembre 2015, Jeune Afrique soulignait " après sa condamnation en mars 2014 à 25 ans de prison pour génocide par la cour d’assises de Paris, Pascal Simbikangwa, ex-officier de la garde présidentielle rwandaise, avait fait appel".

En même temps, dans un communiqué publié le 10 décembre 2015, Alain Gauthier, le Président du Collectif des Parties civiles pour le Rwanda avait indiqué, "nous apprenons que le procès en appel de Pascal Simbikangwa (…) se tiendra à la Cour d’assises de Bobigny du 24 octobre au 9 décembre 2016".

"Seulement deux condamnations en vingt-deux ans  !"

Exprimant sa désolation face à la lenteur de la justice française qui aboutit parfois à des résultats effarants, l’Ambassadeur du Rwanda en France, Jacques Kabale pose ainsi la question, "deux condamnations en vingt-deux ans ! Combien de temps faudra-t-il encore pour juger tous les génocidaires présents sur le sol français ?"

Le 2 octobre dernier une décision sur le non- lieu prononcé par le parquet de Paris mettait à l’abri de toutes poursuites le prêtre rwandais Wenceslas Munyeshyaka.

Pendant ce temps, le FDH, Mouvement mondial des droits de l’homme déclarait que "une information judiciaire avait été ouverte peu après le dépôt de plainte des victimes rwandaises réfugiées en France, en juillet 1995, informées de la présence de l’abbé Wenceslas Munyeshyaka à proximité de Privas".

Le FDIH précise alors que "Wenceslas Munyeshyaka avait été mis en examen pour génocide, crimes contre l’humanité et actes de torture et de barbarie".

Et au mouvement des Droits de l’homme d’ajouter à cette époque qu’"il s’agit de la plus ancienne affaire concernant le génocide contre les Tutsi au Rwanda devant la justice française... 20 ans de procédure pour aboutir à un non lieu, c’est incompréhensible pour les victimes et nos organisations parties civiles qui attendaient la tenue d’un procès depuis 1995", a déclaré Patrick Baudouin, Avocat et Président d’honneur de la FIDH

On ne peut toutefois pas se passer de ces lignes reprises dans l’Express du 1 er août 2011 qui parlent d’elles-mêmes, dans un article signé Pascal Ceaux où il reconnait que "l’irritation monte au Rwanda contre ce que le gouvernement de Kigali appelle les «  lenteurs de la justice française  »".

Et à ce journaliste d’ajouter, "le petit pays africain frappé par le génocide contre les Tutsi par les Hutu en 1994, après l’assassinat du président Juvénal Habyarimana, reproche à Paris son peu d’empressement à juger les génocidaires réfugiés en France ".

Un appareil judiciaire jugé lent

Depuis le 10 mai 2016, pour la deuxième fois en vingt-deux ans, une cour d’assises française se penche sur le génocide perpétré en 1994 au Rwanda, au titre de la compétence universelle.

Deux anciens bourgmestres de la commune de Kabarondo allaient y comparaître pendant huit semaines. Accusés d’avoir incité et participé au génocide contre les Tutsis, Tito Barahira et Octavien Ngenzi nient les faits qui leur sont reprochés.

Pour Alain Gauthier, la satisfaction de voir la justice française, longtemps passive, amorcer une mue ne saurait occulter qu’après vingt années de traque, "le fardeau est extrêmement lourd à porter".

"C’est éprouvant physiquement et psychologiquement : il faut faire face au déni des présumés génocidaires et aux insinuations des avocats de la défense", soupire-t-il.

Faire face aux frais de justice aussi : pour le seul procès Barahira-Ngenzi, le CPCR, partie civile, doit rassembler 180 000 euros pour régler les honoraires de ses avocats.

Si la création d’un pôle judiciaire spécialisé a représenté une avancée tangible, Alain Gauthier déplore le manque d’effectifs qui entrave son efficacité. Beaucoup de dossiers ouverts, deux procès seulement dont l’un est encore en appel.

Jean Louis Kagahe


 

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