Voilà des années que certains fantômes hantent la FIFA. Le monde sait, ou croit savoir. La rumeur court, puis enfle et devient un bœuf qui éclate sur la place publique. Mafia. Magouilles. Pots de vin. Tout ce que le monde représente de zones d’ombre paraissait toujours affecter l’organisation. Contre vents et marées, ce n’était que négation, rires, sarcasme et moqueries. Puis l’abcès qui se crève, comme une multitude de boutons sur le visage d’un ado en train de muer. Désolé, l’image n’est pas, c’est vrai, très appétissante.

Il ne servira à rien de livrer des noms en pâture. La vérité, et la vraie bonne nouvelle, est que la descente de police de Zurich a fait éclater une institution à la recherche d’un second souffle, plus lisse, plus honnête, plus crédible. Une nouvelle élection aura donc lieu entre décembre 2015 et mars 2016 car les statuts de la FIFA prévoient un délai minimum de 4 mois. Alors qu’il venait d’être réélu, Blatter le ponte Suisse partait, en avouant que sa Fifa avait besoin d’un vrai lifting.

Michel Platini en sera-t-il le successeur et le sauveur ? A la tête de l’UEFA, Platini serait d’après certains politiques un bon choix et le garant d’un fonctionnement droit et plus noble. Il est le favori des bookmakers anglais. Des mois de discussions accoucheront d’une réponse dans le délai déjà évoqué. Les noms du Prince Ali ou de Figo sont aussi régulièrement entendus.
Pour Michel Platini, la décision de Sepp Blatter, qui devenait de plus en plus insupportable aux yeux de l’ancien numéro 10 de l’équipe de France fût, je cite : "une décision difficile, courageuse, mais une bonne décision." Même son de cloche chez le Président Le Graet qui souligne, malgré tout, qu’il ne regrette pas d’avoir voté pour lui...

Le grand coup de pied provoqué par la sortie de Blatter ne manquera pas de relancer les deux débats les plus saignants, au delà des enjeux économiques ou des enveloppes à distribuer. Les Coupes du Monde de 2018 et 2022 en Russie et au Qatar peuvent-elles encore être annulées et reportées dans d’autres lieux ?

Le Président de la fédération anglaise n’en démord pas et souhaite un nouveau vote, soulignant que si Blatter est parti, c’est en réaction aux derniers événements choquants de Zurich qui ont jeté, en plus des plumes, le goudron sur le visage toujours serein de Monsieur Blatter qui a perdu son rictus. Si l’Angleterre se frotte les mains, l’Allemagne aussi, insistant sur le fait que rien n’aurait pu être comme avant et que la pression était trop grande.

Effectivement, Blatter surveillé par le FBI sans être nommé ou cité par l’enquête officielle, mais pour avoir démissionné juste après une réélection, ne devait pas être très tranquille, et il nous vient à l’esprit cette image de série B où en pleine nuit le héros du film, en général le Shériff, se réveille en sueur et en quelques secondes voit défiler 40 ans de sa vie à la tête d’une institution qu’il dit avoir aimé par dessus tout quand, dehors à travers un rideau qui flotte, devant une fenêtre entrouverte, il aperçoit les gyrophares des voitures de ses collègues qui s’apprêtent à le cueillir.

Un amour trop fort, obsessionnel, certainement du bon, puis beaucoup de mauvais, avec pour résultat un amour du pouvoir presque maladif. Blatter est parti sans menottes, mais il s’est rendu. Fin du film.

Si tous les problèmes ne sont pas résolus par le départ d’une personne, il permettra à une institution dont le football a besoin, d’évoluer dans un monde moins opaque, plus juste, le plus démocratique possible. Et il y a plus d’heureux que de déçus. Avant, si possible, de ne pas répéter les même erreurs.

Pascal Niyonsaba