https://www.traditionrolex.com/25 Nyaruguru-Mata : les mineurs dans les plantations théicoles

Nyaruguru-Mata : les mineurs dans les plantations théicoles

Par 2015-12-07 17:04:18

[caption id="attachment_2224" align="aligncenter" width="803"]Les enfants sont nombreux dans les plantations théicoles de Mata (Photo D.Gasarabwe) Les enfants sont nombreux dans les plantations théicoles de Mata (Photo D.Gasarabwe)[/caption]


 

Pendant cette période des vacances scolaires à Nyaruguru qui correspond au temps de VUP, les enfants et écoliers se ruent vers des plantations de théiers. Faute de personnel et pour sauver leurs postes, les chefs d’équipe, appelés communément, capitas, les accueillent à bras ouverts et les recrutent massivement.

Le salaire journalier pour quelqu’un qui travaille dans les programmes communautaires payant de l’Etat (VUP) est de 1000 frw. Et l’énergie journalière dépensée est inférieure à celle que le travail dans les plantations de théiers recquiert.

C’est ainsi que pendant les périodes de VUP intensives, des villageois préfèrent travailler là où ils gagnent plus et dépensent moins. Aujourd’hui c’est le cas et le flux des demandeurs d’emploi dans les plantations de théiers chute.

Les mineurs contents de leur indépendance financière

Ces enfants quittent leurs maisons vers 6h, font la marche pour arriver aux plantations et rentrent tard vers 18h. Ils passent plusieurs heures avec des adultes, ne mangent pas et apprennent souvent des conduites malsaines.

“Au départ, mes deux fillettes sont allées travailler dans ce projet de théiers pendant les vacances. Je trouvais cela normal. Au moment de la rentrée, elles n’ont pas voulu retourner à l’école. Elles étaient en 5ème et 6ème primaire. Mais tant pis. Elles rapportent tout de même. Cela me permet de payer régulièrement un cultivateur adulte 700 frws par jour. Je suis tranquille”. Dit une mère dont les deux filles, âgées respectivement de 12 et 15 ans, travaillent dans ces plantations.

”Je ne demande plus le savon à mes parents, ni la crème pour m’embellir. J’en achète moi-même grâce à l’argent que je gagne moi-même,” déclare une jeune fille rencontrée sur les lieux.

Ces enfants, en majorité des fillettes, ont appris précocement à manipuler l’argent. Certaines ont acquis malheureusement un langage insolent comparable à celui des enfants de la rue des bindovilles.
Dans certaines familles, ce sont malheureusement ces mêmes enfants qui couvrent les charges familiales, notamment la nourriture. Les responsabilités se sont inversées.

Du coup, pour une partie de ces jeunes, le respect et l’obéissance aux parents en général et aux adultes en particulier n’existent plus. Bientôt, laissés à eux seuls dans ces champs de plantations théières, sans l’autorité d’un adulte responsable, ces enfants prendront de mauvais comportements et seront difficilement gérables.

Le risque de grossesses non désirées et la transmission des MST

La hauteur des théiers atteint environ 1,2 mètres. Les champs sont épais tellement que l’on ne peut pas voir quelqu’un qui est assis à une distance de trois mètres. Or des champs s’étendent sur plusieurs kilomètres de long.

Ainsi il devient difficile de savoir ce que deux jeunes gens, fille et garçon, qui travaillent côte à côte et qui se flottent pendants 8 heures et 6 jours sur 7 se disent et font. Des amitiés clandestines, quelques fois même officielles se créent. Certains liens aboutissent à des mariages légaux. Mais d’autres, clandestines, conduisent vers des grossesses non désirées ou éventuellement vers des maladies sexuellement transmissibles (MST).

Les responsables de l’Usine nient les faits

Pour le directeur général de l’usine de thé de Mata, aucun mineur ne travaille dans les plantations théicoles. “Nous faisons tout pour qu’il n’y ait aucun enfant de moins de 16 ans qui mette les pieds dans ces plantations. Nous y veillons chaque jour. Si nous en attrapons un, nous le ramenons dans sa famille et rappelons aux parents leurs devoirs. Aujourd’hui il n’y en a pratiquement pas”, a indiqué Yves Mungwakuzwe, directeur général de l’Usine de Thé Mata.

“Leurs salaires passent toujours par des institutions financières. Un enfant qui n’a pas encore acquis la carte d’identité n’a pas droit à un compte bancaire.” Poursuit Yves pour appuyer son avis.

Le rôle des autorites locales

Selon l’agronome du district de Nyaruguru, M. Thomas, des consignes adéquates pour le respect des droits de l’enfant sont régulièrement données à tous les partenaires du district, y compris les responsables des usines.

“Nous faisons des suivis réguliers. Ici le droit de l’enfant est bien respecté. Je serais étonné qu’il y ait ce genre de dérapage”. Déclare Thomas.

Pour certaines ONG qui oeuvrent dans le domaine de la protection des enfants dans la région, des efforts supplémentaires de sensibilisation sont nécessaires.

” Il ya encore un problème de mentalité. Cela ne me surprend surtout pas. Il y a éventuellement des complicités à un tel ou tel niveau”. Nous dit un des responsables d’une ONG internationale.

Les enfants qui travaillent dans ces plantations sont très malins

Les enfants qui travaillent dans ces plantations savent très bien que c’est illégal. Ils jouent au cache cache avec l’agronome. “Quand nous entendons le bruit de la motocyclette (une Yamaha AG 100). C’est l’agronome qui arrive. Nous connaissons le bruit. Nous nous couchons. Quand il repart, nous reprenons le travail”. Me dit une jeune fille de 13 ans qui, par ailleurs, a abandonné l’école. La visite de sa mère, pour vérification, a été concluante.

Les usines de thé contribuent énormément au développement économique et au bien être de la population locale. Mais il faudrait absolument veiller à ce que les droits de ce petit groupe d’enfants, aussi minime soit-il, soient protégés.

C’est bien que le développement humain est palpable dans la région mais il revient aux autorités locales et à ses partenaires de mener un combat rigoureux contre ce mal qui détruit la jeunesse. Les droits de l’enfant devraient être redits aux familles et aux employeurs et évoluer vers des sanctions en cas de bavure.

Domice Gasarabwe


 

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