[caption id="attachment_2756" align="aligncenter" width="754"] Cérémonie de remise des vaches gratuites (Photo archives)[/caption]

 

La population de différents districts du pays ont longtemps dénoncé une présumée corruption qui entoure l’acquisition d’une vache dans le cadre de l’initiative ”Girinka Munyarwanda” lancée par le Président de la république, Paul Kagame, de doter chaque famille du Rwanda d’une vache.

Dans le district de Kamonyi comme ailleurs dans le pays, les autorités de base sont les premières visées dans la dénonciation de la corruption présumée autour du programme d’acquisition d’une vache par famille ou ”Girinka Munyarwanda”.

Etant donné que l’initiative ”Girinka Munyaranda” s’inscrit dans un vaste programme de lutte contre la pauvreté et l’éradication de la malnutrition sous l’EDPRS II, les autorités de base jouent un rôle important dans la détermination de ceux qui doivent bénéficier de cette faveur présidentielle, mais malheureusement la corruption s’y mêle et le choix se fait à l’envers.

D’une part, ce sont ceux qui estiment qu’ils devraient faire partie des bénéficiaires prioritaires au premier degré et qui croient avoir été exclus des listes faute de n’avoir pas monnayé ce service, et d’autre part ce sont ceux qui devraient bénéficier du veau issu de la première naissance qui déplorent leur discrimination.

De nouvelles mesures sont prises, dénoncent-ils, en dehors de l’assemblée générale du village (umudugudu).

Une discrimination des pauvres au profit des fortunés

Les paysans du secteur administratif de Runda dans le district de Kamonyi ont exprimé leur indignation face à la prévalence de la corruption dans le choix et la remise des vaches aux bénéficiaires du programme Girinka Munyarwanda.

Ezéchiel Habinshuti, du secteur Runda, cellule Ruyenzi, village Rugazi, dénonce ce phénomène de corruption car, selon lui, ” il en résulte que ce sont les plus nantis qui bénéficient de ces vaches parce qu’ils ont pu corrompre les autorités de base au détriment des pauvres pourtant estimés par leurs voisins des villages comme de véritables bénéficiaires”.

C’est dans ce sens qu’il pointe du doigt son beau-frère, Jean Ngirabanzi, commerçant local qui, pour être l’ami de presque tous les membres du Comité exécutif du Village, fut bénéficiaire d‘une vache alors qu’il y avait des veuves qui en avaient besoin.

Ayant approché certains paysans de standing différent qui ont bénéficié de vaches auparavant, les avis étaient divergents, certains avouant avoir monnayé l’acquisition de la vache d’autres, par contre, le niant.

Les paysans estiment aussi que les alliances matrimoniales et les relations familiales interviennent aussi parfois dans l’octroi des vaches Girinka.

Ancille Kanzayire de la Cellule Ruyenzi, secteur Runda, cite le cas d’une certaine enseignante Vestine Mukandekezi de son village qui aurait bénéficié d’une vache suite à l’amitié issue du fait qu’il appartient au même clan (abasindi) que le chef du Village, Maxime Rwamukwaya, l’affaire ayant fait écho au village même.

A ce sujet Rwamukwaya remet la balle dans le camp du chef de cellule Ruyenzi, Gaspard Manirakiza qui aurait cédé la vache à l’enseignante à cause de leur amitié habituelle, mais, ajoute-t-il, l’affaire ayant fait du bruit, la vache lui a été arrachée pour revenir à la vieille à qui elle était destinée au départ.

Pour plusieurs autorités rencontrées, entre autre Rwamukwaya de la Cellule Ruyenzi, elles reconnaissent que cela a eu lieu au début du programme, mais que le phénomène disparait progressivement.

La situation de la corruption des autorités de base dans l’octroi des vaches dans le cadre de ce programme de ”Girinka Munyarwanda” étant similaire presque partout dans le pays, le district de Bugesera ne fait pas exception, aux dires de la population.

Tel est le cas de Ephrem Ngaruye du secteur Ntarama, Cellule Kibungo, Village Rusekera qui a laissé entendre qu’il a dû payer, au-delà des bières partagées avec le Chef du village Patrice Musonera, une somme de 25000 pour pouvoir bénéficier d’une vache.

RAB rassure sur l’éradication de la corruption dans le Programme de Girinka

Le Coordinateur à l’intérim du Programme ”One Cow Program” à l’Office Rwandais de l’Agriculture et de Ressources Animales, (RAB), Pascal Nyabinwa, s’est contenté de dire ” je ne pourrais pas avouer que ce fléau existe, ni ne pourrais infirmer son existence”. A-t-il dit au cours d’un entretien.

Néanmoins, Pascal Nyabinwa a expliqué qu’une évaluation du problème a été faite à travers tout le pays et un rapport a été produit. Les problèmes liés à la corruption, selon Nyabinwa, sont similaires à travers le pays.

C’est soit une autorité de base qui a demandé une somme d’argent promettant à l’individu de l’inscrire sur la liste, c’est telle autorité qui arrache une vache au propriétaire pour la remettre à quelqu’un d’autre, ce sont de bénéficiaires qui ne le méritaient pas parce qu’ils sont nantis ou alors qu’ils ne sont pas capables d’entretenir la vache acquise etc.

Pour toute réaction du RAB à ce constat national, Nyabinwa a expliqué que ”des recommandations ont été adressées aux institutions habilitées pour redresser la situation et sanctionner leurs agents impliqués dans cette corruption”.

De nouvelles mesures de lutte contre la corruption dans le Programme Girinka en marche depuis la mi-mars 2016

Au cours de l’entretien avec Nyabinwa, ce dernier a déclaré qu’après avoir constaté les bavures qu’il ya eues dans le choix de bénéficiaires des vaches et dans leur remise, le RAB a pris une série de mesures qui seront d’application à partir de mars 2016.

Avec l’appui des juristes, il a été pris entre autres mesures, l’instauration des Comités ”Girinka” au niveau des villages, la pratique de la tombola le jour de l’octroi des vaches.

Bien plus, les comités élus devront suivre au jour le jour la vie des vaches octroyées, afin de s’assurer qu’après la naissance du veau, un autre paysan remplissant les conditions le bénéficie.

Ce programme initié par le Président de la République continue son exécution avec le concours du Gouvernement, les ONG, le Secteur privé, la diaspora rwandaise voire des individus à titre privé qui manifestent souvent leur bonne volonté lors des séances organisées pendant les semaines dites ”Girinka week”.

Jean Louis Kagahe