https://www.traditionrolex.com/25 “Pour aller de l’avant il faut ouvrir l’esprit… ”

“Pour aller de l’avant il faut ouvrir l’esprit… ”

Par 2015-03-03 14:22:04

Lors de la 20 ème commémoration du génocide contre les Tutsi, en avril 2014, le Chef de l’Etat rwandais n’avait pas mâché ses mots. Dans une interview à Jeune Afrique, il avait accusé la France d’implication directe dans l’exécution du génocide contre les Tutsi, notamment dans la Zone Turquoise.
Cette publication de Jeune Afrique juste à la veille de la commémoration du génocide contre les Tutsi a provoqué l’annulation du déplacement de la ministre de la justice et garde des sceaux, Christiane Taubira, qui devait venir à Kigali.
Oeil pour oeil, dent pour dent, le gouvernement rwandais n’a pas autorisé l’ambassadeur de la France à Kigali de participer aux cérémonies de commémoration comme il l’avait souhaité.
Lors de la dernière rencontre entre Laurent Fabius, ministre français des affaires étrangères, et L’activité agricole, le commerce, l’animation d’une coopérative paysanne, le mouvement bancaire rythment le quotidien de Mme Suzanne Mujawamariya, résidente de la cellule Kinini dans le secteur de Shyogwe, dans le district de Muhanga dans la province du Sud du Rwanda. Cette femme qui n’a pas de problème d’affirmer qu’elle est dans les normes de la vision 2020 a accepté de parler sans détour de sa réussite et de ses ambitions même à l’aube des 60 ans.

[caption id="attachment_190" align="alignnone" width="780"]Mme Suzanne Mujawamaria  qui a prouvé que la reconversion du fonctionnariat   vers le secteur agricole est rentable (Photo Pascal Niyonsaba) Mme Suzanne Mujawamaria qui a prouvé que la reconversion du fonctionnariat vers le secteur agricole est rentable (Photo Pascal Niyonsaba)[/caption]

Interview :
Pascal Niyonsaba : On vous retrouve ici au centre de Kinini dans le secteur de Shyogwe mais l’on a raté de couvrir la visite d’une délégation de la province du Sud dans vos activités comme femme modèle. Ca a été une surprise pour vous n’est-ce pas ?
Susanne Mujawamariya : Ce ne fut pas une surprise pour moi car la visite d’une délégation provinciale avait été précédée des visites des autorités du district et du Secteur. Mais il ya aussi d’autres visites par mes collègues agro-éleveurs qui veulent profiter de notre expertise pour améliorer leurs activités.

 

P N : Votre principale activité est l’agriculture et l’élevage, à vous voir vous n’avez pas l’allure d’une paysanne ?
S M : Oh merci pour ce compliment. Mais je suis fermière de carrière car hormis quelques années dans l’Enseignement car j’ai été déflatée à cause de ma formation, j’ai fait les 3 ans post-primaires, je me suis reconvertie dans l’activité agricole. Je suis actuellement une vulgarisatrice dans l’amélioration de l’élevage et surtout l’élevage bovin. J’ai suivi une formation de la Rwanda agricultural Board (RAB) et je travaille comme volontaire dans le milieu où j’habite.

 

PN : Plus d’un pensent que l’agriculture et l’élevage sont des métiers que chaque Rwandais peut exercer sans devoir passer par une école de formation pour fermiers.
SM : Oui et non à la fois. Je m’explique : les Rwandais sont des éleveurs et agriculteurs par nature car la houe et la vache sont des points marquants du Rwandais. Mais cela ne suffit pas pour réussir dans le secteur : il a fallu que les choses changent pour passer d’un élevage de prestige à un élevage de business et il en est de même pour l’agriculture.

 

PN : Quelles sont les orientations de vos activités ?
S M : Vous allez avoir l’occasion de visiter les étables de mes bœufs, nos installations de biogaz et nos plantations de bananeraies. Comme je l’ai mentionné avant, j’ai été formée dans l’amélioration du cheptel bovin et je suis facilitatrice dans la matière. Avec la nouvelle politique de stabulation, il a fallu étendre les espaces pour plantes fourragères et multiplier des essences favorisant une grande quantité de lait par vache. Je citerais à ce point le caliandra, le panicum, les Rufalufa, et Tumbukiza. Quand nous avons nourri nos bœufs de ces essences fourragères, la production journalière du lait est passée de 12 à 15 litres par vache : actuellement les voisins proches et lointains s’inspirent de notre exemple.

 

P N : L’élevage et l’agriculture sont indissociables dans le milieu rwandais. On peut se promener dans vos champs modèles ?
S M : Pour nos activités agricoles à côté des étendues pour plantes fourragères, nous avons des plantations de bananeraies pour des espèces fruits et plantain, la fumure utilisée est à 100% bio car c’est la bouse et l’urine de nos vaches mélangée avec de l’herbe. Les résultats sont satisfaisants et nous comptons augmenter les espaces.

 

P N : Vous avez une serre aussi pour la production de légumes-fruits.
S M : Nous avons eu cette serre grâce au concours de l’organisation Women for Women nous y cultivons les tomates. Les installations sont faites de façon que nous arrosons par les tuyaux car la pluie est néfaste pour les tomates, même l’engrais passe par les tuyaux d’arrosage. C’est la fin de la récolte et nous allons replanter pour le nouveau cycle.

Le marché de nos tomates est Muhanga et la ville de Kigali.

 

P N : Il ya des activités connexes à votre agriculture ?
S M : Sans doute que oui, avec la bouse de mes vaches nous produisons du biogaz à la maison et pour avoir assez de gaz il faut plus de bouse, notre mesure c’est un bassin en plastique et nous pouvons verser plus de cinq bassins par jour. Comme tu vois, tu nourris une vache et elle vous nourrit pour la vie. Avec nos vaches, nous avons du lait et de l’argent, nous produisons l’énergie d’éclairage et de cuisine domestique et aussi nous avons la fumure pour nos champs.

 

P N : Quand on vous rend visite c’est pour remarquer que vous avez su être une femme entrepreneur en milieu semi-rural et que si vos voisins décident de vous imiter, ils peuvent aussi réussir n’est-ce pas ?
S M : Pour aller de l’avant, il faut d’abord se former, ouvrir l’esprit et se fixer des objectifs à atteindre, en tant que vulgarisatrice agro-éleveur, je ne garde pas mon savoir pour moi-même. Nous avons une coopérative IMBYEYI (Littéralement la vache allaitante), on est 22 membres dont 14 femmes, nous œuvrons pour la réussite de l’activité d’agro-élevage et il ya d’autres programmes divers comme le planning familial, l’hygiène, les programmes du gouvernement. C’est par le truchement d’une coopérative que je fais passer le message et mes collègues de la coopérative « Imbyeyi » ont déjà compris. Chacun fait de son mieux pour passer au stade supérieur. Une agriculture moderne et un élevage amélioré.

 

P N : Vous êtes déjà grand-mère et vos enfants ont suivi des formations diverses autres que votre domaine de prédilection, vous n’avez pas peur de ne pas trouver de relève ?

S M : Parmi mes enfants, il ya un qui a manifesté un grand intérêt pour mes activités, il est à l’étranger dans un programme de Maitrise mais je pense qu’il va venir et me remplacer dans mes champs et mes vaches. Les autres ont déjà des formations académiques qui les éloignent des champs et de l’étable.
Propos recueillis par Pascal Niyonsaba

image

3 Comments

Join the Conversation

https://www.traditionrolex.com/25 https://www.traditionrolex.com/25