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Georgette Umubyeyi :obéissance au destin

Par 2016-06-06 14:08:38

Mme Georgette Umubyeyi  (Photo Gentil)


Les conséquences fâcheuses du génocide contre les Tutsi ont réveillé la conscience de certaines personnes pour venir en aide aux veuves, orphelins et tous les autres groupes sociaux vulnérables issus de ce drame. Sur la liste de ces rares personnes généreuses, figure Mme Georgette Umubyeyi, ancienne agent de la Banque Nationale du Rwanda. Elle a lancé en 1996, "The New Hope Technical Institute" qui forme les rescapés du génocide et autres individus démunis dans différentes filières professionnelles. Interview  !

La Nouvelle Relève (LNR)  : Dans quel esprit ou contexte avez-vous décidé de créer une école qui aide les rescapés du génocide à poursuivre leur formation professionnelle  ?

GUM  : C’est au lendemain du génocide contre les Tutsi, en 1996, lorsque la vie des rescapés du génocide n’exprimait aucune lueur d’espoir sur leur vie post-génocide. En particulier, c’étaient principalement les filles qui étaient plus vulnérables que les autres catégories de gens en souffrance à l’issue de cette tragédie.

LNR  : Comment êtes-vous arrivée à créer "The New Hope Technical Institute"  ?

GUM  : Tout au départ, ma conscience m’a interpelée à faire quelque chose de bon à l’endroit des filles rescapées du génocide contre les Tutsi. Il fallait à tout prix les aider à sortir de leur vie drastique post-génocide en les formant dans la coupe couture, la cuisine et la conservation et à bien faire la coiffure esthétique. Pour y arriver, nous avons recouru auprès des individus généreux qui comprennent, en général, la situation dans laquelle le Rwanda se retrouve et en particulier, les jeunes filles orphelines, rescapées du génocide. Du coup, des familles japonaises ont accepté de financer la construction des locaux de l’institution. Ils continuent aussi à nous financer jusqu’à présent.

LNR  : Le chemin parcouru était-il aisé  ?

GUM  : Pas du tout, il fallait frapper à la porte, ici et là aux ministères pour décrocher un petit fonds pour la formation des élèves. J’ai décidé d’abandonner mon travail à la Banque Nationale du Rwanda pour ne m’occuper que du développement de "The New Hope Technical Institute". Nous avons travaillé dur pour avoir le matériel didactique et autres matériels pour la bonne formation pratique des candidats.  Imaginez-vous les matériels de cuisine, ceux du salon de coiffure, les machines à coudre pour n’en citer que ça.

LNR  : A deux décennies post-génocide, les objectifs poursuivis au départ  restent-ils les mêmes aujourd’hui  ?

GUM  : Non, nous avons ouvert les horizons pour la formation de toutes les catégories de personnes vulnérables. A présent, nous œuvrons de concert avec les secteurs administratifs dans le choix des personnes nécessiteuses à être formées dans notre école. Les hommes et les femmes, les garçons et les filles y sont nombreux. Mais, il faut qu’ils soient rangés dans la catégorie de personnes démunies et /ou vulnérables, reconnues par les autorités. Rien n’empêche que d’autres personnes relativement pourvues soient les bienvenues à être formées à condition de payer.

LNR  : Combien de formés avez-vous à présent  ?

GUM  : The New Hope Technical Institute dénombre 110 formés (élèves) dont 17 garçons. Cependant, ces élèves n’ont pas le même âge ni le même niveau ou capacité intellectuelle. Nous sommes tolérants envers les recrutés dans la coupe couture. Nous exigeons au moins le niveau de 6ème année primaire. Mais en ce qui concerne la cuisine et conservation ainsi que la coiffure esthétique, le niveau du tronc commun (3ème secondaire) est une condition obligatoire. En effet, nous supposons que ces domaines exigent un certain niveau de connaissance du français et de l’anglais. Un cuisinier aura toujours à communiquer avec ses clients qui ne sont pas absolument des Rwandais. La durée de formation s’articule sur une année seulement.

LNR  : Quels sont vos partenaires ?

GUM  : L’école a certainement des partenaires. Outre les individus qui nous financent, nous coopérons avec la Commission Nationale de Démobilisation et de Réinsertion des ex-Combattants dans la formation des vétérans et anciens combattants. Depuis 1996, l’école compte 1639 ex-combattants formés dont 152 femmes. Ils sont formés pour une période de 6 mois au lieu d’une année. Ces ex-combattants s’adaptent vite différemment d’autres formés civils. L’Association des Femmes pour la Paix Mondiale (AFPM) demeure également notre partenaire.

LNR  : Y-a-il un lien entre les activités de votre institution et la paix  ?

GUM  : Certainement  ! Tout commence par la paix, elle est à la base de toutes les activités humaines. Nous avons la mission d’enseigner à nos élèves l’éducation civique et morale qui sous-entend les rapports entre les individus tant dans leurs milieux professionnels que dans leurs sociétés. La lutte quotidienne pour acquérir la paix est un sacrifice, une détermination ferme, ce qui nous motive alors  !

LNR  : Quels sont les défis affrontés  ?

 GUM  : Le grand problème réside sur le redressement des élèves qui ont abandonné l’école depuis longtemps, car ils reviennent avec d’autres attitudes inattendues. Ils ont des difficultés de mener une communication cohérente avec leurs collègues et enseignants. A cela s’ajoutent les moyens financiers limités de l’école.

LNR  : Quelles sont les perspectives d’avenir ?

GUM  : Evoluer suivant les réalités des époques. Au cours des années, la vulnérabilité des rescapés du génocide et d’autres groupes vulnérables sera maîtrisée via les politiques en cours. Dans le futur, l’école pourra se focaliser sur la catégorie des personnes démunies, autrement dit, celles qui n’auront pas de moyens pour se payer des frais scolaires. Je pense que la vulnérabilité est un fléau qui ne sera pas maîtrisé ni aujourd’hui ni demain. Il y a toujours des orientations à poursuivre  !

Propos recueillis par Safari Byuma


 

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